mercredi 26 septembre 2012

Café-cacao


Le prix minimum garanti sauvera-t-il les paysans !

L’Etat ivoirien a décidé, depuis 2012, de vendre désormais par anticipation (on dit aussi à terme) sa production cacaoyère comme il le faisait au temps de la Caistab, de l’indépendance à 1998/1999. Il vient, rapporte-t-on, de vendre aux enchères plus de 1,1 million de tonnes de fèves de cacao sur le marché international des matières premières aux chocolatiers et autres spéculateurs de ce marché! Maintenant, il lui faudra honorer cet engagement vis-à-vis de ces clients, du marché international de peur de se discréditer. C’est à ce niveau que se situe l’enjeu de la nouvelle option qui vient mettre fin aux yoyos de la libéralisation. Non pas que la Côte d’Ivoire ne soit pas capable de fournir la quantité vendue, avec sa production annuelle qui oscille entre 1,3 et 1,5 million de tonnes selon les saisons ! Mais parce que la Côte d’Ivoire doit faire face à la fraude qui s’est développée depuis quelques années dans cette filière. En effet, depuis notamment 2003 à ce jour, d’importantes quantités de la production cacaoyère ivoirienne sortent frauduleusement du territoire pour être vendue ou se retrouver au Ghana et au Burkina Faso (devenu par ce fait, exportateur du cacao). Quel est le volume de fèves de cacao qui sortent ainsi frauduleusement du pays pour enrichir d’autres nations ouest-africaines? Bien malin pourrait y répondre ! Tant le contrôle effectif de l’Etat de Côte d’Ivoire sur les zones productrices de l’Ouest et de l’Est s’est amenuisé depuis du fait de la crise.
S’il faut comprendre la motivation de l’Etat en optant, près de 14 ans après la libéralisation de la filière café-cacao en 1998/1999,  pour un retour au système traditionnel de la Caisse de stabilisation et de soutien des prix  (Caistab) caractérisé par la fixation annuelle par le gouvernement, d’un prix minimum garanti aux cacaoculteurs, il est peu probable que ce «come back » à un système qui était pourtant vomi par les institutions de Bretton Woods (Banque mondiale et Fmi) –le considérant alors comme une caisse noir des tenants du pouvoir -, soit très rassurant pour les paysans. Parce qu’à l’évidence, il influencera très peu positivement l’amélioration des conditions de vie  des paysans. Surtout dans ce contexte de paupérisation croissante et généralisée de petits agriculteurs ivoiriens. Petits agriculteurs, et notamment cacaoculteurs qui pourraient, si l’on n’y prend garde, être «absorbés  et/ou employés», totalement ou partiellement, par des multinationales et grands chocolatiers ayant mis pied dans la filière café-cacao ainsi que dans les plantations cacaoyères ivoiriennes. Alors qu’on avait pensé que cette présence tirerait les cours bord champ à la hausse, elle ne sert que le statu quo : paysans toujours et de plus en plus affamés, et les autres acteurs de la filière grands bénéficiaires et de plus en plus engraissés ! Si le début de la libéralisation permit aux cacaoculteurs de vendre leur kilo de cacao à plus de 1000 Fcfa le kilo, la suite a été une désillusion ! Tout comme l’ont été les structures de gestion pleines de « CC » comme Fdpcc, Bcc, Arcc, Frcc, etc.
Au fait, pendant combien de temps, encore, les cacaoculteurs ivoiriens et les acteurs nationaux auront le contrôle de la production nationale de fèves de cacao ? Juste une question !
Gooré Bi Hué
Journaliste-Economiste
Diplômé GPE